lundi 2 février 2009

LES 7 VIES D'UN CHAT (2)


Fuir au plus vite le brouhaha de ce monde si bruyant, tel était mon objectif. La vie de tout félin est gérée par deux critères primordiaux pour la survie de notre caractère affectif : le calme et les câlins. Tout humain ne respectant pas ces critères se voit généralement affublé d’une créature qui ne pense qu’à manger et faire ses griffes sur toutes les surfaces résistantes à ses griffes… Cependant, du haut de leur taille immense, les humains ne se préoccupent pas tant que ça de ce qui se passe au niveau de leurs pieds. C’est d’ailleurs pour cela qu’ils sont si inhabiles lorsqu’ils tentent de vous éviter tout en marchant. C’est si drôle de les voir lorsque leurs pattes se croisent et se re-croisent jusqu'à la chute finale… Et à ce moment là vous filez vous cacher pour observer cet humain rabaissé à votre niveau, pester contre tout et n’importe quoi. C’est si drôle, mais tellement dangereux… Un jour je n’ai pas eu autant de chance, et le père de X m’est tombé dessus avant même que j’ai pu bouger le moindre coussinet. La masse de graisse qui s’était abattu subitement sur moi m’a longtemps fait souffrir, mais le pire fut la punition que m’infligèrent les parents de mon maître : obligé de passer la nuit dehors ! Vous n’imaginez peut être pas la gravité de la situation, mais à chaque fois que je me retrouve seul dehors, je suis à la merci de tous les chats errants du quartier, qui viennent me siffler aux oreilles des miaulements de jalousie, jusqu'à ce que je décide de me battre. Non pas que ça me déplaise de temps en temps de jouer des griffes et des crocs, mais… je prends énormément soin de mon pelage, j’évite au maximum de me mêler à toute effluve de violence.
Pour l’heure, caché sous la chaise vide de mon petit maître, j’entreprends une séance de toilettage. Depuis la porte d’entrée, je sais que le père est en train de me surveiller : il a peur que je saute sur la table pour voler. Mais s’il savait à quel point leur nourriture me dégoûte ! Mais j’aime les voir sur le qui-vive. Près à me bondir dessus à la moindre occasion… Délicatement je lèche une de mes pattes antérieures et me la passe derrière l’oreille. Je ne sais pas pourquoi, mais les humains ont peur quand je fais ça. Ils deviennent complètement dingues et crient dans toute la maison « Il va pleuvoir ! Ce stupide catas a passé sa patte derrière son oreille ! Et moi qui comptais profiter du soleil ! … »
Une bande d’idiots je vous dis… Comme si je pouvais modifier le temps d’un simple coup de langue bien placé. Remarque… Se serait bien si c’était possible ! Lorsque monsieur va faire du vélo, ou que madame prend la voiture dont elle ne sait pas mettre la capote ? Cruel que je suis !J’aime tant cela voir les humains souffrir… Il n’y a qu’un ici que je respecte : X. Et il me le rend bien croyez-moi ! A croire qu’il comprend mes désirs au moindre miaulement.
L’absence de réaction du père m’inquiète. Son regard semble lancer des éclairs, et la seule solution possible semble la fuite, avant que l’orage éclate. Alors d’un bond, je me rue dans l’escalier de bois qui mène aux chambres. Celle de X est tout au fond du couloir. C’est la seule pièce où mes coussinets se plaisent à fouler cette moquette si douce dans laquelle j’aime me rouler parfois sous les caresses du petit d’homme.
En parlant de lui, le voici allongé sur son lit, la tête entre ses bras. Se pourrait-il qu’il se soit laissé allé dans les bras de Morphée ? Non. D’une part, cela n’a jamais été dans les habitudes du garçon, mais aussi parce que je ne mis que peu de temps a remarqué la petite étoile cristalline qui se frayait un chemin sur la joue du petit.
Lorsque X est heureux, je le suis aussi. Et s’il est triste, je ressens chacune de ses douleurs comme si elles étaient miennes. Alors je me frotte contre son bras nu, dans un ronronnement qui est censé réconforter. Mais les larmes se mettent à couler de plus belles. J’ai beau scruter cette pupille humaine qui me regarde dans le vide, je n’arrive à sonder l’origine de ce chagrin. Une chose est sûr, je n’en suis pas la cause, car une main est en train de me parcourir l’échine. Je sens chacun des doigts du jeune explorer la moindre parcelle de mon pelage. Lentement mes paupières inférieures se ferment d’elles même, puis c’est au tour de mes paupières supérieures, alors que mes pattes plient sous l’effet de la fatigue. Je me mets en boule contre mon maître, en espérant que celui-ci aura la même idée : dormir pour oublier. Demain sera un nouveau jour.

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