lundi 2 février 2009

LES 7 VIES D'UN CHAT (1)


Se tenant la tête pour ne pas sombrer dans le sommeil, Luca tente de faire bonne figure à table. Repas de famille, comme tous les 12 Février, pour célébrer l’anniversaire de madame Martin. Long et pesant sur l’estomac, cet amalgame de nourriture fait figure d’orgie romaine aux yeux du garçon. Comment des êtres aussi censés, se faisant appeler « Humains », pouvaient accepter toute cette pitance amenée gracieusement morte et décorative sur une table trop chargé en couverts clinquants et ridicules ? C’est jour de fêtes à la maison, et qu’il le veuille ou non, il en sera ainsi encore jusqu'à ce que la vieille dame nous ait quitté les deux pieds devant.
Madame Martin n’est pourtant pas un membre de la petite famille de Luca. Simplement une voisine de longue date, qui n’a plus toute sa tête. Ce genre de personne qu’on prend en compassion au bout de quelques années, lorsqu’on comprend qu’il lui reste peu de temps à vivre. Ce que les Hommes peuvent être cupide lorsqu’il s’agit d’héritage promis, faute d’enfants et de mari…
Je vois bien que Luca pense comme moi, mais impossible de manifester quoi que ce soit sous peine de me retrouver dehors. Il fait beaucoup trop froid à l’extérieur pour tenter ne serai-ce qu’un miaulement. Vous n’imaginez même pas dans quelle colère se met la mère, lorsque je vais sur le lit de mon petit maître ! Alors miauler pendant ce moment de culte au Dieu nourriture en deviens insensé. Cependant ce n’est que par peur du froid que je résiste à cette envi, qui me chatouille les moustaches, de me sentir exister. Juste un moment. Aussi bref soit-il, mais assez pour que Luca tourne son regard vers moi, qu’il comprenne ma solitude, et qu’il m’entraine dans son paradis du jouet qu’est sa chambre.
Bientôt 3 ans que j’étais dans cette famille. Jamais je n’en ai connu d’autre, mais comme j’entends souvent : « l’herbe est plus verte chez le voisin ». Mais Luca m’aime trop pour que je l’abandonne. Il a autant besoin de moi que moi de lui. Si la mère est une vraie maniaque de la propreté, le père est une vraie larve, qui passerait son temps devant les écrans si sa femme ne l’obligeait pas à faire des choses. Quand je dis des « choses » … C’est un bien grand mot ! Vu que les domestiques s’occupent de la majorité des taches ménagères. Même ma patté pour chat m’est servi par Trevor, le cuisinier. Tous les jours c’est le même manège, les gens vont et viennent dans la maison, sans faire attention à cette boule de poils blanc qui re-revisite pour la énième fois, chaque parcelles de la grande maison.
Rapidement mes paupières se ferment d’elles même, sans que je ne bouge la moindre moustache, bercé par les voix de ces humains et les claquements des couverts… Ce n’est qu’au bout d’un laps de temps (qu’il me serai impossible de déterminer) qu’ouvrant un œil, j’eu la certitude que le supplice de Luca prenait fin. Les mains se serrent, les bisous claquent sur les joues, et les voix se font plus fortes. La mère Martin a déjà repris sa canne, et se dirige d’un pas peu rassurant vers la porte d’entrée. Étirant mes pattes avant pour me sortir de mes rêves félins, je ne pense alors qu’a une seule chose : me jeter sur les genoux de mon maître pour profiter de caresse. Mais voilà que la vieille dame s’arrête sur mon pelage et en teste la structure de sa main ridées. Bien sûr je n’aime pas décevoir les gens, alors je commence à ronronner, mais c’est un vrai supplice que l’on m’impose à cet instant précis.
_ « C’est un bel animal que vous avez là ! » s’exclame la dame, d’une voix chevrotante,
Mais personne ne semble avoir entendu, et la femme reprend sa dangereuse excursion vers la poignée de la porte, avant de disparaître de mon champ de vision. Je pensais alors pouvoir (enfin !) assouvir mes besoins affectifs, lorsque je m’aperçus que Luca n’était plus à sa place.
Direction la chambre. Le seul endroit où Luca se sent en sécurité, au milieu de ses jouets, entre ces quatre murs de posters de ses stars de basket préféré...

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